Les prix des logements ont augmenté de +140 % entre 1998 et 2008. Après une baisse en 2009, les prix se sont remis à augmenter dans plusieurs régions. Pourquoi les prix de l’immobilier ont-ils explosé en France ? À partir d’études chiffrées, nous allons voir que les facteurs souvent cités ne sont pas les plus impactant…

Cet article vient compléter tous nos articles sur l’énorme bulle immobilière en France de ce début du XXIe siècle.

Qu’est-ce qui fixe un prix ?

Le prix d’un appartement ou d’une maison est celui qui convient à la fois au vendeur et à un acheteur. Mais l’équilibre offre/demande est-il le seul élément qui fixe les prix ?

Pour expliquer la forte augmentation des prix des logements en France de cette dernière décennie, on entend de multiples raisons. Qu’en est-il réellement ? Quels sont les facteurs les plus importants ?

Ce document de Jacques Friggit permet de répondre à de nombreuses questions sur les causes réelles. Il permet de se rapprocher des vraies raisons de cette flambée des prix entre 1998 et 2010 (+140 % alors que l’inflation ne dépassait pas 20 %).

Quelles sont les fausses croyances sur les causes de la flambée de l’immobilier entre 2000 et 2010 ?

Les raisons évoquées pour expliquer cette forte hausse des prix sont souvent diverses et variées. Elles relèvent bien souvent de simples suppositions et de ressentis. Jacques Friggit revient sur ces différentes causes souvent évoquées et en écarte la plupart en se basant sur des études chiffrées et détaillées.

Voici un résumé des raisons écartées par cette étude :

  • Pénurie de logements : l’élasticité du prix par rapport au nombre de logements est trop faible pour expliquer une forte augmentation. De plus, s’il y avait une pénurie réelle de logements, les loyers auraient subi la même contrainte et donc une évolution similaire.

Cet avis me semble cohérent. Néanmoins, il est difficile de mesurer réellement l’impact réel d’une forte communication orientée sur l’effet de rareté sur les acquéreurs. De nombreuses études ont démontré l’influence que peut avoir le sentiment de rareté sur la prise de décision d’achat et sur les efforts qu’un consommateur est prêt à faire pour acquérir ce bien rare. Si, c’est un sujet qui vous intéresse, je vous recommande vivement le livre « Influence et manipulation » de Robert B. Cialdini.

  • Rareté et prix du foncier : pour Friggit ce sont les prix des logements voisins qui déterminent les prix du foncier. Il pense donc que les fortes augmentations du prix des terrains constructibles sont plutôt une conséquence qu’une cause de la hausse du prix des logements. (Voir également la fiscalité sur un terrain constructible)
  • Achats par des étrangers : Le nombre total d’achats immobiliers en France effectués par des étrangers est infime (environ 1% entre 2000 et 2010). Seules quelques régions spécifiques ont une part d’achats étrangers plus élevés. Mais ce phénomène est en forte diminution depuis 2005.
  • Vieillissement de la population : une étude révèle que, dès que le chef de famille dépasse les 56 ans, les ménages sont davantage vendeurs qu’acheteurs. Le vieillissement de la population française devrait, au contraire, provoquer une augmentation de l’offre et donc détendre un peu les prix.
  • Réduction du nombre de personnes par ménage : ce phénomène se produit depuis les années 1960, il ne peut expliquer à lui seul, une explosion des prix entre 2000 et 2010. Ce n’est pas un élément nouveau.
  • Augmentation des aides publiques : la dépense de logement des ménages (15 % du PIB) et les achats ou constructions de logements (13 % du PIB) représentent des parts importantes du PIB. Les aides supplémentaires n’en représentent qu’une infime partie (0.1 % du PIB pour le prêt à taux zéro par exemple).
  • Effet inflationniste de la revente : comme les prix augmentent, les ménages qui vendent pour acheter un nouveau logement disposent de plus d’argent (la hausse entraîne la hausse). Le poids de la revente pour le financement de résidences principales est évalué à 21 %. Si cette part est élevée, elle est restée stable entre 2002 et 2006 et le nombre de transactions également (proche de 800 000 par an).
  • Poids des donations : il est resté stable (environ 3 % du prix d’achat) entre 2002 et 2006. En outre, les ménages héritent vers 50-60 ans. Soit un âge à partir duquel on est plus vendeur qu’acheteur comme vu précédemment.

flambée des prix de l'immobilier

Les nouvelles règles financières bouleversent l’équilibre du passé

Pour Jacques Friggit, ce sont principalement les modifications des conditions d’emprunt qui ont modifié radicalement les prix des logements en France. Le fort allongement de la durée des prêts et la diminution continue des taux (taux d’intérêt net d’inflation observée) expliquent à eux seuls une bonne partie de cette hausse importante.

  • Pour les investisseurs : Jacques Friggit considère qu’ils sont davantage prêts à accepter des rendements très bas puisque les rendements des obligations sont eux aussi très bas. Il ne comprend pas, en revanche, que de nombreux investisseurs se détournent des actions. Même en tenant compte des risques élevés à court terme, les potentiels de rentabilité élevée à long terme demeurent intacts. Les ménages pensent que les fortes hausse de ces dernières années vont se reproduire en immobilier et tablent sur une performance future exceptionnelle sans prendre en compte le risque de dévalorisation potentiel.
  • Pour les acquéreurs de résidences principales : la hausse des durées d’emprunt et la baisse des taux permettent pour une mensualité constante d’emprunter davantage. Seulement les conditions financières n’expliquent qu’une hausse potentielle de 35 à 40 % et non des 70 % observés.

Nous recommandons pourtant de ne jamais emprunter sur plus de 20 ans. En effet, quand on a compris comment se calculent les intérêts, on perçoit davantage l’impact énorme que produit une durée d’emprunt sur le coût de son financement.

Si vous souhaitez éviter la double peine « prix hauts + financement coûteux », retrouvez nos conseils pour faire chuter votre coût de prêt immobilier.

Point de vue logique : 100% OK, mais l’effet psychologique alors ?

Les explications de Jacques Friggit sur les causes réelles de l’augmentation importante des prix de l’immobilier sont, dans l’ensemble, convaincantes. D’un point de vue logique, chiffres à l’appui, il n’y a que les modifications des conditions de financement qui peuvent autant impacter les prix.

Seulement, à mon sens, il écarte trop rapidement les effets psychologiques que peuvent avoir certains éléments dans la prise de décision de devenir propriétaire ou non :

  • Combien de Français ont eu encore plus envie d’acheter parce qu’il avait le droit à un crédit gratuit pour le faire (ou à un crédit d’impôt avant 2011) ?
  • Combien d’investisseurs se jettent sur la défiscalisation Pinel dans le seul but de ne plus payer d’impôt (ou beaucoup moins), alors même que certains de ces investissements sont déconseillés ?
  • Combien de personnes ont, consciemment ou inconsciemment, peur de se retrouver sans toit ou de ne jamais pouvoir acheter et font donc des choix financièrement illogiques mais qui font croire à plus de sécurité ?

Comme on a pu le voir, il y a quelque temps déjà, un achat immobilier est fortement dirigé par nos émotions et nos sentiments. C’est l’une des raisons majeures pour laquelle les Français privilégient toujours l’achat à la location alors que c’est loin d’être toujours la meilleure solution financière. Sans cela, la majorité des Français refuseraient de payer aussi cher pour être propriétaire d’une maison ou d’un appartement.