Que ce soit pour un projet d’achat de résidence principale ou d’investissement locatif ou pour un projet de vente, il est légitime de s’interroger sur la baisse des prix de l’immobilier à venir en France suite à la forte augmentation des taux de crédit immobilier, aux difficultés pour emprunter et plus globalement à cause de la forte inflation subie et du contexte global. Alors quand les prix de l’immobilier vont-ils baisser en France ? Est-ce déjà le cas dans différents secteurs géographiques ? Voici une analyse complète de la situation actuelle pour le marché immobilier français.
Mise à jour : découvrez notre dernier article sur la baisse des prix de l’immobilier en 2024 et l’interrogation sur un krach.
Explosion des taux de crédit et de l’inflation, difficultés d’emprunter : le marché au ralenti
Jusqu’à début 2022, le marché de l’immobilier était en pleine euphorie. Les ventes étaient très nombreuses malgré une offre assez restreinte dans de nombreux secteurs géographiques. Les acheteurs étaient présents. Mais depuis, de nombreux facteurs sont venus gripper cette belle dynamique. Voici un rappel rapide du contexte.
De 1,06 % à 1,82 % : réduction de la capacité d’emprunt
Si beaucoup de personnes souhaitent acheter une maison ou un appartement en France, la demande réelle doit se faire au regard de la solvabilité de ces acheteurs potentiels. Or, quand les taux augmentent très fortement comme depuis quelques mois, les budgets des acquéreurs se réduisent rapidement. Comme vous pouvez le voir sur notre suivi de l’évolution du taux immobilier : on est passé d’un taux immobilier moyen à 1,06 % en janvier à un taux immobilier moyen de 1,82 % sur les crédits souscrits en août 2022. Vous pouvez en savoir plus à ce sujet en lisant notre article détaillé sur les taux de crédit immobilier en octobre 2022. Cela empire encore pour les taux immobiliers d’octobre 2024.
Il est très probable de voir une forte hausse de taux d’ici à la fin de l’année. La moyenne va rapidement dépasser 2,00 %.
Combien puis-je emprunter ? A cette question, la réponse a fortement varié au cours de l’année suite à l’explosion des taux de crédit immobilier. Les emprunteurs ont vu leur capacité d’emprunt se réduire assez rapidement. Par exemple, pour un crédit sur 25 ans avec une mensualité de 800 euros, on passe d’un montant d’emprunt de 207 256 € avec un taux moyen à 1,20 % début 2022 à 187 664 € avec un taux de crédit immobilier moyen à 2,05 % en octobre 2022. Soit une perte de capacité d’achat de 19 592 € en seulement 1à mois pour cet exemple.
Contraintes sur les crédits immobiliers
En plus de ces hausses de taux, les emprunteurs se voient imposer différentes contraintes qui viennent augmenter le nombre de refus de crédit immobilier :
- Le HCSF impose aux banques de respecter des critères précis pour au moins 80 % des dossiers : durée maximale de 25 ans, taux d’endettement maximum de 35 % assurance emprunteur comprise, apport personnel minimum. Retrouvez toutes les informations sur le HCSF et le crédit immobilier en 2024.
- Les taux d’usure sont des plafonds imposés par la banque de France aux banques et aux organismes prêteurs. Une banque ne peut pas légalement prêter à un taux TAEG supérieur à celui du taux d’usure sous peine de poursuite pénale. Seulement, les plafonds de ces taux d’usure ne remontent pas aussi vite que les taux des banques. Ce qui crée un effet de ciseau et entraîne une forte hausse des refus de crédit.
Ainsi, il est bien plus difficile d’obtenir un crédit immobilier en 2022 et cela même pour des ménages avec de bons dossiers. Cela pèse fortement sur la demande.
Forte inflation et difficultés économiques
En dehors de ces conditions spécifiques au marché de l’immobilier, les particuliers doivent supporter une explosion de leurs factures et de leurs dépenses à cause d’une inflation très forte actuellement. Cela provient principalement des prix de l’énergie (électricité, gaz, essence, etc.) mais aussi d’une flambée des prix de l’alimentation (plus de 10 % de hausse en moyenne en un an). Les marges de manœuvre se réduisent pour beaucoup de particuliers. De plus, ce climat compliqué n’aide pas à se projeter dans un projet d’achat de maison ou d’appartement qui est un projet ambitieux et sur du long terme.
Ainsi, de nombreux acquéreurs potentiels préfèrent reporter leur projet.
Pour trouver des ressources supplémentaires pour faire face à ces coûts supplémentaires, il est possible de réduire ses dépenses. Cela passe, par exemple, par le fait de profiter de la loi Lemoine pour changer d’assurance emprunteur pour une moins chère pour un même niveau de garanties. Cela permet d’économiser quelques euros à dizaines d’euros par mois sans perdre en qualité d’assurance.
Pour ceux qui peinent à boucler les fins de mois, il est possible de faire une simulation de rachat de crédit pour étudier comment réaménager leur remboursement de crédits avec une mensualité globale plus adaptée à leur capacité financière du moment.
Les statistiques sur les prix de l’immobilier ont 6 mois de retard
Autre différence avec le marché boursier, en matière de statistiques et d’informations sur le marché immobilier, il ne faut pas être pressé pour avoir des chiffres fiables. En effet, il y a généralement plusieurs mois d’écart entre la publication d’une étude chiffrée et le moment où ses transactions ont été réalisées. Ainsi, dans un retournement de tendance comme celui qui se produit en 2022, on reçoit des communiqués annonçant des hausses de prix toujours au-dessus de +6 % alors que le contexte a fortement changé. Ce qui n’aide pas à percevoir l’impact de ces changements majeurs.
Ne soyez pas surpris lorsque vous lisez des informations sur les prix de l’immobilier en décalage avec ce que vous constatez. Il faut toujours prendre en compte ce laps de temps des remontées d’information.
Indice notaires INSEE
Par exemple, les statistiques principales sur les prix de l’immobilier en France proviennent de l’INSEE. Cet institut publie chaque trimestre un bilan sur le marché immobilier ancien : les volumes de ventes, les évolutions des prix, etc. C’est très intéressant et très complet. Mais cela ne permet que de constater ce qui s’est passé environ 6 mois plus tôt…
Prenons un exemple, les statistiques sur les prix immobilier au 2ème trimestre 2022 ont été publiées le 6 septembre 2022. Or, quand on parle des ventes du 2ème trimestre, on parle des actes de vente définitifs qui ont été signés pendant cette période. Ceux-ci correspondent environ à des compromis de vente signés 3 mois plus tôt, soit au 1er trimestre. Ainsi cette publication nous permet de connaître en septembre, le comportement global du marché en janvier, février, mars. Soit juste avant le début de la véritable augmentation des taux, peu de temps après le début de la guerre en Ukraine, etc.
Base DVF, Patrim, etc.
De la même manière, tous les outils et sites sur les prix de l’immobilier se basent sur des données qui ont plusieurs mois. La base DVF du gouvernement sur les prix de l’immobilier qui est la plus juste car basée sur les réels prix de vente des contrats signés chez les notaires recense les transactions qui après avoir mis environ 3 mois pour aboutir et après quelques semaines avant d’être intégré dans la base de données. Ainsi, les ventes qui sont basées sur une prise en compte du nouveau contexte ne seront visibles que d’ici quelques mois.
Il en est de même pour des outils tels que Patrim.
Statistiques basées sur les annonces…
D’autres indicateurs ou baromètres peuvent se fier au prix des annonces immobilières. C’est assez peu révélateur des prix du marché, surtout dans un contexte où les acheteurs ont repris la main sur les négociations des prix et où les délais de vente s’allongent. Comme on peut le voir sur Castorus, certaines annonces enregistrent de belles réductions sur les prix fixés au départ.
Comment faire estimer mon bien immobilier ?
Pour faire évaluer votre bien immobilier, vous avez la possibilité d’utiliser notre simulateur d’estimation immobilière en ligne gratuit. Vous pouvez également faire appel à un professionnel de votre secteur géographique comme un notaire ou une agence immobilière. Vous en découvrirez plus dans notre article sur comment faire estimer sa maison.
Marché immobilier plus lent que boursier : on ne passe pas de fortement haussier à baissier
En bourse, le cours des actions s’ajuste en quelques jours, voire en quelques heures parfois. On dit qu’en bourse, on monte par l’escalier et on descend par l’ascenseur. En immobilier, le cycle est beaucoup plus lent. D’une part car un projet met plusieurs mois à se concrétiser (voir le temps nécessaire pour acheter une maison). C’est un marché bien moins fluide. Il faut du temps pour que l’équilibre entre l’offre et la demande s’ajuste à des changements importants sur les conditions du marché comme un retournement de tendance et une explosion des taux d’intérêt.
Ainsi, il est habituel d’observer avant tout un ralentissement des ventes. Il y a moins de demande solvable. Les vendeurs mettent plus de temps à trouver un acheteur. Puis si la situation persiste et que les conditions continuent à se dégrader, c’est là que certains vendeurs pressés commencent à préférer baisser leur prix pour finaliser leur vente. D’autres peuvent se permettre de retirer leurs biens du marché et de le remettre en vente dans quelques années quand la situation sera préférable pour eux.
Alors qu’on était dans un marché où les prix de l’immobilier augmentaient encore de plus de 6 % en moyenne sur un an au 1er trimestre 2022. On ne pouvait pas passer directement à des prix en baisse en quelques mois. Cela se compte plutôt en plusieurs trimestres de difficultés. C’est ce que l’on envisageait déjà lors de notre présentation des tendances pour l’immobilier en 2022 publiées en décembre 2021 (découvrez les tendances pour le marché immobilier 2023).
Est-ce que les prix de l’immobilier baissent déjà en 2022 ?
Comme nous l’avons vu ci-dessus, alors que dans de nombreux secteurs, les prix des logements anciens ont fortement augmenté ces derniers trimestres, on ne peut pas s’attendre à une baisse généralisée immédiate. On assiste pour le moment à un ralentissement des ventes plus ou moins fort selon les marchés. La demande solvable diminue. Les délais de vente s’allongent. Il y a des signes qui ne trompent pas.
Des milliers de marchés immobiliers différents
Il faut rappeler qu’il n’y a pas un seul marché immobilier en France, mais des milliers de micro-marchés. Pour chaque type de bien et chaque secteur, il y a des évolutions différentes des comportements, de l’offre et de la demande, etc. Il convient donc de bien nuancer quand on parle d’une baisse ou d’une hausse globale des prix de l’immobilier. Les biens qui vous intéressent pour les acheter dans votre ville ne suivent peut-être pas la tendance générale. De même pour ceux qui veulent vendre leur maison ou leur appartement.
Stagnation des prix avec inflation à 5 ou 6 % : baisse de la valeur réelle des biens
Autre fait à prendre en compte, un produit dont le prix reste stable en période d’inflation forte perd en réalité de la valeur. En septembre 2022, l’INSEE annonce une hausse des prix à la consommation de 5,6 % sur un an en France. C’est bien moins que dans certains autres pays européens, mais c’est déjà beaucoup. En réalité, sur l’ensemble de l’année 2022, il y aura peu de secteur où les prix de l’immobilier auront plus augmenté que l’inflation.
Baisse des prix de l’immobilier à Paris, stagnation à Lyon, etc.
Déjà sur l’évolution des prix des logements anciens communiqués par l’INSEE pour le 2ème trimestre (et donc sur des prix négociés entre acheteur et vendeur au 1er trimestre), il y a des baisses notamment sur les principales villes en France. Voici quelques exemples.
- Sur un an, les prix des appartements à Paris sont en baisse de 0,8 %. Cela peut paraître peu, mais avec une inflation à 5,6 %, cela donne une baisse de la valeur réelle de 6,1 %.
- Sur la même période, les prix des appartements anciens à Lyon affichent une stagnation avec +0,0 %. Cela constitue une baisse de valeur de 5,6 % si l’on tient compte de l’inflation.
On peut ainsi voir que les endroits où les prix de l’immobilier avaient le plus explosé avant 2022, sont ceux où les prix de l’immobilier marquent le pas désormais.
Il y a une sorte de rattrapage entre les zones géographiques. Les acquéreurs se détournent des grandes métropoles et recherche davantage de l’espace et notamment des maisons anciennes. Sur les données de l’INSEE du 2ème trimestre, on est à +8,4 % pour les maisons anciennes en France en moyenne, contre +4,5 % pour les appartements anciens.
Il faudra attendre le 24 novembre 2022 pour avoir les chiffres de l’INSEE sur le 3ème trimestre 2022. Ces derniers montreront comment s’est comporté le marché sur la période de négociation du 2ème trimestre 2022, soit au début de la hausse des taux et des complications du marché. Ce ne sera qu’en mai 2023 que nous aurons les statistiques sur les conditions actuelles de vente au 4ème trimestre 2022.
Comment vont évoluer les prix de l’immobilier en 2023 ?
Personne n’a de boule de cristal, mais les tendances sont assez nettes. Il y quelques petites baisses de prix ici ou là en 2022 et les augmentations se font de moins en moins fortes. Les taux de prêt immobilier vont encore augmenter en ce mois d’octobre et sur les derniers mois de l’année 2022.
Sauf si la situation se calme au niveau des conditions de refinancement des banques et de l’inflation. Ces dernières auront probablement besoin d’augmenter encore les taux immobiliers pour ne pas prêter à perte. Après avoir stagné proche de 1,00 % pendant des mois, les taux moyens pourraient osciller entre 2,20 et 3,00 % en 2023. Cela engendre une perte de capacité d’emprunt de l’ordre de 15 à 20 % selon les projets et les conditions réelles de financement.
Un article paru dans Ouest-France explique pourquoi les banques veulent volontairement réduire la production de crédit. Elles doivent se préparer à une baisse des prix de l’immobilier, notamment en augmentant leurs ratios de fonds-propres. Ainsi, elles vont moins prêter ou de manière plus sûre, c’est-à-dire en privilégiant les meilleurs clients.
Cela va inévitablement avoir un impact majeur sur les prix de l’immobilier en France. Il est fort probable de voir une période de baisse globale des prix en 2023. Ceux qui auront réellement besoin de vendre devront se tourner vers l’acquéreur le plus offrant. Le pouvoir de négociation va revenir dans les mains des acheteurs. Regardez comment négocier le prix d’un bien immobilier. Plus la demande sera faible par rapport à l’offre et plus vite les prix pourront s’ajuster à la baisse. Cela n’empêchera pas de voir les prix augmenter encore un peu dans les zones où la demande est forte par rapport à une offre trop faible. Comme toujours en matière d’immobilier, l’emplacement est l’élément le plus impactant sur le prix d’une maison ou d’un appartement.
Vers une véritable chute des prix de l’immobilier ? Un krach immobilier ?
Les fondamentaux restent très bons. Les Français rêvent toujours de propriété et beaucoup souhaitent réaliser un achat immobilier. Ils en auront les moyens si un nouvel équilibre se trouve entre les prix des biens et les nouvelles capacités d’achat avec des taux d’intérêt plus élevé. Et si on les laisse emprunter.Il y aura toujours de la demande. Peut-être moins euphorique, mais elle sera là.
En outre, le manque d’offre de biens à vendre dans de nombreuses villes ne permet pas d’espérer une véritable chute des prix de l’immobilier pour ceux qui veulent acheter moins cher. On ne manque pas de logements en France. Seulement, soit il n’y en a pas assez pour ceux qui veulent se loger dans les villes les plus demandées, soit une grande partie du parc est enlevée du marché de la résidence principale (à acheter ou à louer) car ils sont achetés pour en faire des résidences secondaires ou des locations saisonnières du style Airbnb. C’est le cas notamment de nombreuses villes du littoral, de certaines stations de montagne ou autres grandes villes très touristiques (Paris, etc.).
Ainsi, dans le contexte actuel, il n’y aura pas de krach immobilier en 2023. Nous ne sommes pas en bulle comme en 2008 ou en 2012, même si les prix ont beaucoup augmenté. Pour cela, il faudrait bien d’autres facteurs pour faire exploser le marché (une guerre qui s’approche ou sur notre territoire, des taux de crédit immobilier à 4 ou 5 % rapidement, etc.). Souhaitons plutôt qu’un ajustement des prix puisse permettre à chacun de pouvoir réaliser son projet immobilier dans des conditions acceptables.
Actuellement, la capacité d’achat a nettement diminué par rapport aux dernières années. Il faut faire plus d’efforts pour acheter un même logement comme le montrent les courbes de Friggit comme celle-ci :
La hausse des prix, puis celle des taux, ont fait augmenter à plus de 23 ans la durée d’achat d’un logement que l’on pouvait avoir pour un endettement sur 20 ans entre 2017 et 2020. Nous sommes revenus au niveau de difficultés de 2015 pour acheter son logement en moyenne en France. Cette tendance de dégradation du pouvoir d’achat immobilier se poursuivre tant que les taux augmenteront et que les prix ne s’ajusteront pas en conséquence.
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